Une mutation génétique qui pousse à trop manger découverte chez les labradors… et chez l’humain

Une équipe de chercheurs de l’Université de Cambridge a mis en évidence une variante génétique qui expliquerait pourquoi de nombreux labradors – et, dans une moindre mesure, certaines personnes – semblent avoir un appétit insatiable et une forte propension à prendre du poids. Publiée dans la revue Science, cette découverte éclaire d’un jour nouveau les circuits complexes qui régulent notre sensation de faim et notre métabolisme énergétique.

L’obésité canine, reflet d’un problème humain

On estime qu’en Europe, près de 50 % des chiens de compagnie sont en surpoids – une proportion encore plus élevée chez les labradors, pouvant atteindre la moitié des individus. Ce chiffre alarmant fait de cette race un modèle idéal pour l’étude de l’obésité, d’autant plus que ces chiens partagent avec leurs propriétaires humains un environnement alimentaire et des habitudes de vie similaires.

Un contexte génétique déjà exploré

Chez l’humain, plusieurs gènes liés au poids corporel ont déjà été identifiés :

  • FTO et MC4R, associés à la régulation de l’appétit et de la dépense énergétique.
  • LEP, le gène codant la leptine, une hormone clé qui informe le cerveau de nos réserves de graisse et déclenche la sensation de satiété.

Cependant, ces gènes n’expliquaient pas totalement pourquoi certaines personnes – ou certains chiens – mangent sans pouvoir s’arrêter tout en brûlant peu de calories.

Une étude génétique innovante

Les chercheurs ont mené une étude d’association génétique (GWAS) auprès de 250 labradors. Ils ont comparé le profil génétique de chiens en surpoids avec celui de chiens en bonne condition physique. Ensuite, ils ont recoupé ces données avec des banques de données génétiques humaines pour détecter des points communs.

Le gène DENND1B, au cœur de la découverte

Le gène le plus significativement lié au surpoids était DENND1B. Sa mutation :

  • augmente la sensation de faim, en modifiant les signaux hormonaux de satiété,
  • réduit la dépense énergétique de base, favorisant le stockage des graisses.

Ce gène intervient dans la voie leptine–mélanocortine, essentielle pour réguler notre équilibre énergétique et nos comportements alimentaires.

D’autres gènes en jeu

Outre DENND1B, l’étude a identifié quatre autres variantes génétiques ayant un impact plus modéré sur le poids des labradors. Ces gènes sont également présents chez l’humain, soulignant l’importance des circuits neuronaux dans la régulation de l’appétit.

Vers de nouvelles pistes thérapeutiques

Cette avancée ouvre des perspectives intéressantes pour la lutte contre l’obésité. Actuellement, les médicaments les plus efficaces – tels que la sémaglutide (Ozempic®) ou la tirzépatide – ciblent d’autres voies hormonales, notamment la signalisation du GLP-1. En complément, cibler la voie leptine–mélanocortine pourrait offrir de nouvelles options thérapeutiques, notamment pour les patients ou animaux à haut risque génétique.

Conseils pour les propriétaires et les professionnels

  • Régime alimentaire strict : adapter les apports caloriques et la composition des repas au profil génétique et métabolique.
  • Activité physique régulière : augmenter les dépenses caloriques avec un programme adapté à l’âge et à la condition physique.
  • Suivi régulier : surveiller le poids et les mensurations de manière continue.
  • Test génétique : dans un avenir proche, un test simple (sur échantillon de salive ou buccal) pourrait identifier les porteurs de la mutation DENND1B, facilitant des interventions précoces.

Et après ? Le futur de la recherche

Les chercheurs explorent deux voies principales :

  1. Valider cliniquement des médicaments capables de moduler ou inhiber DENND1B chez l’humain et le chien.
  2. Étudier la fréquence de cette mutation génétique dans différentes populations (en France notamment), afin d’ajuster les stratégies de prévention à grande échelle.

Conclusion

La découverte du rôle de DENND1B confirme que l’obésité ne se résume pas à un manque de volonté. Elle est souvent le résultat d’un déséquilibre biologique, inscrit dans notre génétique, qui dérègle notre perception de la faim et notre gestion énergétique. Mieux comprendre ces mécanismes permettra de développer des traitements plus ciblés, mais aussi de mettre en place des stratégies de prévention adaptées à chaque individu… et à chaque chien.

« La génétique n’est pas une fatalité. Elle révèle une prédisposition, mais l’alimentation, l’activité physique et le cadre de vie restent les piliers essentiels d’un poids équilibré. »

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